Afficher l'empreinte carbone d'un service de cloud
A l’heure où l’on parle de plus en plus de réchauffement climatique, de bilan carbone, d’impact du numérique et désormais d’économie d’énergie, il paraît fondamental d’informer les utilisateurs sur les retombées de leurs usages.
C’est d’ailleurs pour les sensibiliser qu’un amendement au projet de loi contre le gaspillage (AGEC) oblige les opérateurs de téléphonie à inscrire sur leurs factures la consommation de données mensuelles et son équivalent en gaz à effet de serre.
Ceci est en théorie obligatoire depuis le 1er Janvier 2022…mais en pratique cela ne semble toujours pas appliqué. Les consommations de données en Mo ou Go sont parfois bien indiquées sur les factures mais pas systématiquement leurs équivalences CO2 (g éqCO2).
Partant de ce constat, OVEA a donc décidé de lancer un programme de recherche et développement pour fournir à ses clients l’équivalent CO2 de la consommation électrique de leurs hébergements internet dédiés.
Les objectifs de ce projet
Réduire son impact environnemental
Tout d’abord en éco-concevant son infrastructure et en en diminuant ses consommations électriques.
Transparence
Pour OVEA il y a un devoir de transparence vis à vis de ses clients.
Ce projet entre bien dans le cadre de son engagement pour l’environnement formalisé par sa labellisation EnVol.
Faire preuve de pédagogie
Bien qu’acteurs du numérique, sensibiliser les publics aux impacts environnementaux des services numériques fait partie de notre démarche.
Pour les DSI (Directeurs des services informatiques) il s’agit de les aider à mieux piloter leurs infrastructures.
Obtenir cette information leur permet d’évaluer une partie des émissions GES d’une activité numérique.
Ils peuvent ainsi mieux comprendre leur usage du cloud, l’analyser, le suivre dans le temps, communiquer, et surtout en réduire les émissions de carbone.
Cette donnée CO2 sera donc utilisée comme un indicateur supplémentaire d’aide à la décision.
Pour les dirigeants, c’est aussi un élément complémentaire leur permettant d’affiner au plus juste le bilan carbone global de l’entreprise.
Ce sera utilisable également pour mesurer l’efficacité des décisions prises en matière environnementale et notamment la réduction continue des impacts.
Fournir un indicateur CO2 compréhensible par tout le monde
L’équivalent CO2 d’une émission de gaz à effet de serre (GES) est compréhensible par tout le monde et vu comme le principal indicateur lié au réchauffement climatique.
En agissant sur les usages internes aux organisations il serait possible de diminuer leur consommation d’énergie de l’ordre de 25%.
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Les indicateurs retenus
Nous avons donc choisi d’effectuer les relevés sur nos baies de serveurs concernées par nos hébergements, sur nos matériels liés au stockage de données, à la sauvegarde et au réseau.
Une variable particulière la vCPU (virtual Central Processing Unit) nous a servi d’étalon. Il s’agit d’une unité physique allouée à une machine virtuelle. Si la configuration du serveur physique le permet, via un nombre de coeur, plusieurs vCPU peuvent être disponibles pour un hébergement internet donné.
Dès lors que la vCPU est connue pour un projet on pourra appliquer un prorata vis à vis de la consommation de l’ensemble des vCPU.
Autres indicateurs que nous avons retenu, le Mix énergétique mensuel réel Français fourni par RTE.
(schéma mix RTE)
Enfin et surtout l’équivalent mensuel gramme de CO2 par Kwh proposé par EDF selon la méthode ACV.
Selon les mois il fluctue et se situe entre 19 et 31g équivalent CO2/KWh.
Dans ce projet notre unité fonctionnelle pourrait être résumée ainsi « utiliser une VM de configuration x pendant 1 mois »
Déroulement du projet d'affichage environnemental
3 personnes y ont participé.
1 responsable d’infrastructure Sébastien
1 développeur d’application Alain
1 coordinateur de projet Pierre
La collecte des données
Celle-ci est passée par plusieurs étapes :
- la détermination des matériels concernés par l’étude
- la récupération des données de configuration des machines virtuelles via les outils de gestion de virtualisation, de monitoring, de supervision.
- la consolidation des consommations électriques via les informations fournies par les PDU (Power Distribution Unit) des équipements. Plus ce PUE se rapproche de 1, plus en quelque sorte le datacenter est vertueux. Concernant notre étude il va donc agir comme un coefficient multiplicateur.
- l’enregistrement de la consommation électrique des différentes baies de stockage et de sauvegarde. Cette information devra être ramenée au Go. 1 Go de stockage mensuel équivaut à x KWh. Il convient de souligner que plusieurs systèmes de sauvegarde peuvent cohabiter, liés chacun d’eux aux différents systèmes d’exploitation installés sur les VM.
Consolidation et validation des formules de calculs
La formule de calcul suivante a été retenue pour chaque VM étudiée :
NB KWh consommé par la part de vCPU utilisée + NB KWh consommé par la part de stockage + NB de KWh consommé par la part de sauvegarde + NB KWh consommé par la quote part de réseau (bande passante utilisée + switch + routeur + firewall)Une analyse de cohérence des résultats sur un échantillon test a été effectuée afin de valider définitivement les formules de calculs.
Enfin, une réflexion autour de la présentation pédagogique des résultats a permis de dégager des équivalences vulgarisées au CO2 : déplacement en voiture, consommation d’un réfrigérateur.
L’insertion des informations recueillies en base de données
La base de données va s’enrichir mensuellement de toutes ces informations, ce qui permettra d’informer les clients sur leur consommation et de produire également des statistiques à plus grande échelle pour de la prévision, de l’anticipation et du pilotage d’infrastructure.
Sans l’utilisation de PDU ce n’est pas simple pour les opérateurs d’obtenir ces informations, car l’ électricité consommée est souvent forfaitisée dans l’espace alloué au m2 par les propriétaires de Datacenter.
Un serveur internet reste allumé 24h/24 et 365 jours par an !
On ne l’éteint donc jamais.
Conclusions
La vCPU : la plus grosse consommatrice d’électricité dans une VM.
Nous constatons que la vCPU occupe la plus grande part de la consommation électrique des VM entre 60 et 65% du total.
Vient ensuite la part d’énergie consommée par le Datacenter lui même, via notament ses systèmes de refroidissement, de traitement de l’air, les onduleurs…entre 30 et 33 % du total.
Puis le stockage pour en moyenne environ 1,5 % du total.
Nous notons que pour des projets nécessitant énormément d’espace de stockage (plusieurs To) cette part peut proportionnellement très vite augmenter.
L’électricité liée à la sauvegarde compte pour peu dans l’ensemble. (< à 1%).
La part réseau est actuellement consolidée dans la valeur globale affectée aux vCPU.
- vCPU 65%
- DATACENTER 33%
- SAUVEGARDE 1.5%
- Stockage 0.5%
Quelles préconisations émanent de ces résultats ?
- Dans la mesure du possible il est judicieux de réduire le dimensionnement des VM notamment au niveau CPU.
Ajuster la VM aux besoins reste la meilleure façon de réduire l’électricité consommée et donc son impact carbone.
- L’autre facteur multiplicateur est bien entendu le PUE du datacenter, plus celui-ci est proche de 1 moins il aura d’impact dans le calcul des consommations électriques de l’infrastructure.
L’extinction et le redémarrage sans problèmes des VM non utilisées peut aussi être un levier si les applications et les usages évidemment le permettent.
Sans mesure pas d’actions possibles
Ces données devraient permettre d’améliorer de façon continue les infrastructures de nos clients.
Elles constituent des outils de suivi.
Pour les DSI ce sont des informations utilisables pour leurs bilans carbone. Ils pourront en déduire également des tendances pour l’avenir, donc anticiper leurs besoins, effectuer des projections.
Elles peuvent également servir de base de calcul dans le cadre d’un avant projet.
Pour OVEA, en tant qu’opérateur, cette étude nous a permis d’obtenir des informations complémentaires sur notre infrastructure dans sa globalité.
Par exemple, nous avons pu déterminer plus précisément la part d’électricité consacrée à la sécurité de nos systèmes.
Consolider mensuellement ces informations nous permet à présent d’effectuer des projections.
Cela confirme également notre approche « juste ce qu’il faut quand il faut » afin de limiter l’utilisation de nouvelles ressources.